Leguide.info: Docteur en droit public économique, Galissa Hady Diallo écrit cette lettre dans un contexte marqué par la volonté commune de préparer et réussir le retour à la démocratie et à l’État de droit en Guinée. Il s’adresse ainsi à ceux qu’il qualifie d’Hommes d’actions intelligentes: «Votre silence est autant coupable que votre inaction est décisive pour la victoire de la pochade, du hasard.»
Bonne lecture !
En toute sincérité, je ne sais si c’est la meilleure façon de vous désigner.
J’aurais aimé trouver une notion plus englobante de votre diversité, de votre hétérogénéité, pour que personne de ceux qui sont lucides dans la lecture de notre société ne soit exclue. Il se trouve que le terme « intellectuel » est quelque peu galvaudé, fourvoyé, parfois restrictif voire trop exclusif. Sauf à être d’accord de le réduire à ceux qui ont eu accès à une formation supérieure ou une expérience adéquate leur permettant d’avoir une lecture lucide, réaliste et un regard critique de la cité et de sa conduite.
Permettez-moi dans ce cas de vous appeler Hommes d’actions intelligentes.
Hommes d’actions intelligentes, je vous appelle. Où que vous soyez, qui que vous soyez, quoi que puisse être votre domaine d’activité. Vous qui, comme peu, êtes persuadés que « le sort d’une nation ne dépend pas de l’aveugle destin[1] ».
Je voudrais vous parler du fond de mon cœur. Que dis-je ? Le cœur et ses sentiments, ses penchants subjectifs, ses atermoiements ? Non. Je vais vous parler avec conviction, intensité, sans filtre et, il faut bien le dire, une certaine témérité. Que sont téméraires ceux qui, malgré les circonstances, s’obstinent à tirer le cordon d’un optimisme agissant dans un océan de pessimisme aboulique, de renoncement, de démission collective. Je ne le dirais jamais assez, le pessimisme de la lucidité ne doit indéfiniment altérer l’optimisme de la volonté.
Je vous appelle, m’entendez-vous ?
J’aimerais parler à cette partie de votre âme qui ne cesse de penser à notre patrie. Cette partie de vous qui lui est si viscéralement liée que, par moment, elle vous empêche de dormir. Vous parlez de la splendeur de notre patrie et de la légèreté de certains de ses enfants. De sa richesse et de ses défis. Du décalage aigre et outrageant entre ses potentialités tant humaines que naturelles et leur sous exploitation au détriment du bien être collectif.
Nous sommes à un stade où nos constats ne suffisent plus. Ils n’auront de sens que si, non seulement nous nous engageons pour ce que nous avons appris, pratiqué, observé ailleurs et diagnostiqué dans notre pays ; mais aussi et surtout que si nous agissons pour matérialiser ce que nous croyons meilleur pour notre patrie.
Il n’est pas plus déroutant qu’un Homme ayant acquis les connaissances nécessaires au développement de son pays et qui, au lieu de les mettre en œuvre, se met à bavarder, à commenter des événements. Puis, pour se soulager l’esprit et le cœur, se met-il à recommencer les commentaires des précédents commentaires des récents ou évènements à venir. Voilà l’âme du renoncement, de la démission. Voici le sens indiscutable de la contradiction. Guinéens, porteurs d’immenses rêves et de naïveté indispensablement positive, porteurs d’optimisme agissant et de lucidité entreprenante, je vous appelle.
Je vous appelle puisqu’il faut qu’on se le dise, l’état de notre pays, dans les plus enfouies de ses indésirables facettes, n’est rien d’autre que le fruit de notre renoncement. Vouloir, un tant soit peu, dédouaner les instruits, les intellectuels, les Hommes d’actions intelligentes que vous êtes, n’est que renoncement et démission collective.
Comme tout combat nécessite des ennemis, je vais vous dire les nôtres. Ils sont nombreux et en même temps peu. La pauvreté, celle qui a engendré tous les autres, est la plus dangereuse d’entre eux et occupe la première place. La pauvreté de l’esprit d’abord. Puis, la pénurie matérielle et enfin l’indigence de nos ambitions, de l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes et de notre devenir. Cette pauvreté a enfanté l’amalgame, l’amateurisme, la facilité et l’indifférence face à tous risques imminents et lointains qui nous guettent.
Je vous appelle, car affronter de tels ennemis ne peut se faire dans la cacophonie et en rangs dispersés. Pas plus qu’elle ne puisse se livrer, une telle guerre, lorsque les valeurs sont inversées. Je vais dire par là, lorsque au devant de la démission des instruits et de l’action des intelligences, on laisse place à l’improvisation.
Oui, je vous appelle pour dérouter et en finir avec l’improvisation, cet autre ennemi qui nous ronge si sournoisement qu’on oublie qu’il en est un. Et pourtant !
L’improvisation dans la gestion des affaires publiques n’est pas une audace, loin de là, c’est une imprudente témérité, une aventure hasardeuse dont les conséquences se répercutent sur toutes les facettes de la vie des citoyens. Si, dans certains cas, l’improvisation est assimilée à un exploit, c’est parce qu’elle contente la masse. Cette dernière en a presque le monopole. Quoi que celle-ci puisse influer, ponctuellement et avec toute proportion gardée, sur le devenir d’une nation, jamais elle ne peut ni ne doit en être la substance. L’improvisation, si récurrente soit-elle, un avenir rassurant ne peut s’y adosser. Comment y remédier ?
Tout ce que je dirais ici ne serait qu’esquisse. Avec une clarté dans la répartition des rôles sur la base des formations, des parcours ou des exploits, l’on pourrait structurer la mission que chacun des citoyens devrait remplir pour la construction de la maison commune, la patrie.
Mettre fin à l’amalgame, c’est faire en sorte que les bûcherons ne se retrouvent pas légistes, ni que les chasseurs ne se surprennent fonctionnaires, pas plus que les tôliers se découvrant chefs chirurgiens. Et encore moins que des décideurs sensés le faire dans la rigueur ne se muent en démagogues chevronnés. Ces cas ne sont que des indications, tant les exemples sont nombreux. Vous l’aurez compris.
Avant tout, notre école. Elle doit être en capacité de former à la vie. Une école élémentaire visonnière, bienveillante et qui, tout en s’ouvrant au monde, n’occulte pas nos ancrages culturels. Un secondaire compétitif, inspirant et professionnalisant pour ceux qui en ont le désir ardent et le talent qui éclos. Un cursus universitaire exempt du mimétisme et du choix par défaut, mais performant et conforme aux objectifs et ambitions que le pays compte satisfaire.
Des écoles spécialisées dans tous les domaines, au premier rang desquels une École d’administration sans laquelle la confusion, le népotisme et l’informel règneront en maîtres. Mais ce n’est pas tout, sans une École d’Administration ou son équivalent, tout discours de modernisation de l’administration ne sera rien d’autre qu’une incantation. Elle permettra également d’éviter le nivellement par le bas de certains de nos ministères, de nos Établissements publics et, beaucoup plus encore, mettre fin à la crise de vocation et la négligence endémique dont souffrent nos collectivités. Il en est également ainsi de nos institutions de santé publique et privée, des écoles d’architectures, d’ingénieries, énergétiques, aéronautiques, spatiales (oui !), de mobilités, environnementales. Et j’en oublie.
Je vous appelle, Hommes d’actions synergiques. Hommes de lucidité. Oui, lucidité car il en faut pour comprendre et intérioriser que nul ne peut faire seul partout et bien faire. Pas plus qu’on puisse se targuer d’être le Messie alors que tout cela nécessite un travail sérieux qui s’inscrit dans un temps long et dont le nœud gordien s’articule autour du fait que le train de la vie est en marche. Il faut de l’ingéniosité et de l’intelligence humaine pour non seulement le maintenir en marche, ce qui est de toute façon inéluctable, mais également le réguler, améliorer ses performances voire le faire changer de direction. La même lucidité qui sait que la religion n’est pas la spiritualité, pas plus que le journalisme ne puisse être de la délation, du minimalisme d’un griot mal inspiré. La loi ne peut se résumer à la morale, pas davantage que la justice ne se résume à l’équilibrisme ou la soif de vengeance. Tout comme le droit est loin d’être un condensé de prêches égrenés du haut d’une estrade. Ou encore que l’économie ne puisse se réduire à des dogmes ou au caméléonisme.
Certains semblent déjà penser que la nature devrait, de la même manière qu’il nous a gratifiés d’un sol riche, en faire de même en nous accordant une exception, une petite pause de la vie qui tourne sans arrêt pour que nous puissions faire tout cela et repartir tranquillement. Cela aurait été une aubaine, quoi qu’il faille se poser la question de ce que nous ferions d’une telle offrande[2]. Inutile d’aller plus loin, une telle chose est factuellement, empiriquement et même, ayons le toupet de le dire, divinement impossible. Impossible car contraire aux principes fixés par le bon Dieu y compris à l’égard de lui-même. Que dit-on déjà ? La vie suit son cours ! Alors, notre ingéniosité collective et notre intelligence commune doivent nous guider pour réorienter et perfectionner un train déjà à vive allure pendant que les occupants ne cessent d’augmenter et d’avoir de nouvelles exigences. Rien qu’en 2050, la population guinéenne oscillera entre 25 et 30 millions, soit le double voire plus que ce qu’elle est aujourd’hui. C’est vous dire.
Oui, j’en appelle à votre introspection.
À quoi bon perdre autant de temps à se former et à envisager une raisonnable répartition des rôles si, in fine, chacun, parfois au mépris de la dignité et de l’intelligence humaine, peut décider de jouer n’importe quel rôle, de n’importe quelle manière, en toute débandade ?
Qu’aurions nous fait de notre intelligence humaine si nos pneumologues se mettaient à vendre du tabac, nos statisticiens à céder à la spéculation et à peu près ? Qu’aurions-nous fait d’elle si nos législateurs et nos institutions continuaient à s’en remettre aux bon sens de nos sages ou à la bonté divine ? Je pourrais continuer à n’en pas m’arrêter…Je reste en tout cas persuadé que le bon Dieu ne nous gratifiera pas d’un cerveau aussi sophistiqué pour, à la fin, « réfléchir » à notre place.
Je vous appelle à des échanges inter-intellectuels, interprofessionnels, interinstitutionnels et intergénérationnels. Il ne s’agit plus de nous, de notre génération, ni même de la prochaine. Il s’agit du devenir de notre patrie. Il s’agit de l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes et de notre devoir envers la patrie. Il s’agit de faire. Il ne s’agira nullement de faire contre ou au détriment de qui que ce soit, mais d’agir pour. Pour la patrie. Pour son devenir. Pour la fierté concrète procurée par ses enfants à ses fils et filles d’appartenir à la terre de Guinée.
L’idée ne consiste pas ici à opposer une classe, quelle qu’elle soit, à une autre. Et de manière plus ciblée, il ne s’agit encore moins d’opposer la classe militaire à l’action intelligente des Hommes de Guinée. Elle consiste surtout à dégager une synergie d’action au service de la nation. Dans la mesure où, reprocher à un militaire d’être mauvais dans la gestion des affaires non militaires de l’État est aussi impertinent que d’en vouloir à un civil profane d’avoir mal défini une stratégie militaire. Les exceptions où les uns se sont illustrés dans le domaine des autres sont si rares qu’elles ne peuvent confirmer la règle ou alors de manière très marginale.
Selon ce vieux principe connu de beaucoup mais dont le rappel récurrent n’est jamais vain, celui qui détient le feu ne devrait compétir avec ceux qui n’ont que des idées et des convictions à défendre, fussent-elles les plus brillantes du monde. Ce n’est que pléonasme que de dire qu’en l’occurrence les armes ne sont pas égales. Donc compétition déloyale, la loi du plus fort …
Comme tout privilège engendre des responsabilités, celle de notre armée reste et demeure celle de sécuriser et de défendre la patrie afin que, dans la meilleure des manières, les belles idées puissent fleurir et se matérialiser. Si la nature a horreur du vide, la vie d’une nation en devient prisonnière et livrée aux improvisations, à l’amalgame et à la démagogie.
Ne se contentant point d’être un vœu pieux, mais plus encore, se déclinant comme une exigence, toute responsabilité implique des comptes à rendre. Il se trouve que les bruits de bottes réduisent au silence une telle exigence fondamentale dans la conduite des affaires publiques. Exception pourrait être faite pour quelques officiers qui se reconvertissent, par choix justifié et pertinent, selon les règles, en passant de l’autre côté de la barrière après un parcours bien probant. Ils pourront ainsi défendre leurs idées sans que ne pèse sur qui que soit la dissuasion et la contrainte du feu. Défendre ses idées à armes égales, si je puis dire, avec n’importe quel autre citoyen en situation de prétendre à des hautes voire ultimes responsabilités dans notre pays.
Il est temps de mettre fin aux raccourcis. La vie des citoyens et l’idée que nous devons nous forger de nous-mêmes et du devenir de notre patrie valent mieux que cela.
Je ne vous encombre même pas avec la mésaventure que constitue le cocktail assez pestilentiel qu’est celui de la olla-podrida entre le monopole du feu, assimilée à une exemption ubuesque de rendre des comptes, et le réflexe de la corruption face à toute difficulté ou délicatesse faisant appel à l’esprit, à l’ingéniosité et à l’inventivité humaine.
Je vous appelle !
Je vous appelle d’autant que nous devons être capables de nous mettre d’accord pour que chacun puisse choisir son chemin en toute connaissance de cause. Pour que les potentialités puissent s’exprimer et cessent d’être étouffées. Bon nombre de ceux qui courent aujourd’hui derrière des fonctions publiques ou administratives ne le font nullement par conviction. Ils le font parce que leur vocation initiale se trouve obstruée par manque de politiques publiques capables de créer les conditions de sa réalisation.
Servir la nation ne peut ni ne doit être admis comme un choix par défaut. C’est là une mortifère confusion des rôles. Le flou, l’amalgame et la confusion dans la répartition des rôles et l’exécution des tâches ne profitent qu’à l’amateurisme. Ce sont des nids iniques de la pauvreté et un terreau fertile pour la démagogie et de son inéluctable débouché qu’est la dictature. Combien dans notre pays se sont reconvertis en pharmacien alors qu’ils avaient étudié la communication, la sociologie, l’informatique ou le droit ? Je n’ai rien contre ces professions, au contraire. Ce ne sont là que des exemples symptomatiques. Il y en a bien d’autres.
Intelligentsia guinéenne, où est votre capacité à disséquer tout cela pendant que le pays en a tant besoin ? Sauf à vouloir continuer la noyade, les sachants que vous êtes ne peuvent être guidés par le hasard, la navigation à vue et par l’improvisation des moins sachants et des minimalistes depuis autant d’années.
Oui, va-t-il falloir que ceux qui savent comment devrait fonctionner normalement un pays, un État, une nation, osent l’affirmer. Sortez de vos buissons. Voilà le sens de votre responsabilité, notre devoir ! Cela n’est en rien de l’arrogance. Et même s’il y a un risque d’être ainsi perçu, ce sera bien moins pire que les non-sachants, malfaisants qui pensent savoir mais qui, naturellement, naviguent à vue.
Convenons-en illico, pour la patrie, aucune fonction n’est inutile, pas mêmes celles exercées en tout anonymat et, pour certaines, noyées dans le mépris des classes qui ne nous est pas si étranger.
Il faut néanmoins affirmer avec vigueur que l’interchangeabilité des fonctions doit obéir à des exigences si strictes que nous ne devrions prendre aucun risque de confier aux guêpes la tâche assignée aux abeilles. Et inversement.
C’est pourquoi, après avoir pris la responsabilité non sans difficultés d’être ce que vous êtes, il vous incombe de remplir votre devoir, de parachever votre mission, de ne plus être amorphes. Finissons-en avec l’indolence. L’action, voilà qui donne du sens au savoir. Son inéluctable conséquence, ai-je envie de dire. Telle est sa suite logique.
Si jamais, par le passé, l’idée consistant à penser qu’on vous tendra les choses dans une assiette dorée vous a frôlé l’esprit, détrompez-vous. L’on ne vous donnera rien. Vous n’aurez et, en conséquence, ne mériterez que ce pourquoi vous vous êtes battus avec conviction et sans complexe.
Pour l’instant, il faut se le dire, le plus grand combat que vous avez eu à mener reste celui du renoncement. Pendant ce temps, le ciel vous regarde tandis que la terre vous supporte. À vous d’assumer votre responsabilité. Celle d’éclairer, d’agir et propulser notre société vers un présent ragaillardissant et un avenir de prospérité, d’abondance, du bien être. Meilleur.
Alors, pour conclure cette lettre, j’ai quelques questions à vous poser et une invitation à vous faire.
De quelle éducation voulons-nous pour nos enfants ? Quelle place octroyons-nous à nos collectivités ? Quelles légitimité, efficacité, et impartialité réservons-nous à notre État central ? De quel système de santé, de retraite et de protection de l’enfance et des travailleurs voulons-nous ? Quel dynamisme économique mettons-nous en place et comment le léguerons-nous à nos enfants, de sorte que leur potentiel s’exprime là où l’État ne peut ou ne doit combler le gap ? Quelle compétitivité donnerons-nous à nos entreprises pour couvrir le marché national et s’exporter ? Quel rôle envisageons-nous pour nos sages dans une société qui tangue entre morale généralisée, religion souvent mal interprétée et politique d’approximation ? À quels équilibre, contrôle et dévolution du pouvoir devons-nous nous y atteler ? Jusqu’à quand les dévolution sanglantes du pouvoir alors même que le concours de notre intelligence collective nous l’interdit ? Comment projetons-nous le rôle de notre pays dans la sous-région, dans le continent et dans le monde ?
Les questions sont interminables et aucune d’entre elles ne va de soi, ni ne sera l’œuvre divine. Aucune ne se fera, nous les ferons ou ne les ferons pas, nous y répondrons ou nous nous déroberons. Nous les affronterons avec opiniâtreté et audace ou nous les esquiverons avec renoncement et lâcheté. Le choix est limpide, l’aplomb presque fatidique, implacable.
Sur toutes ces questions, à l’instar de toutes celles qui y sont afférentes, la fierté nationale ne proclamera pas, elle sera à prouver.
Sur laquelle de ces questions, les Guinéens de 2124 ou 2158 pourraient dire que la tâche leur a été facilitée, le pied convenablement posé à l’étrier et qu’ils auront les leviers nécessaires à leur compétitivité du moment ? Leur aurions-nous légué un pays enviable ? Celle de l’indépendance ne suffira point. Elle n’est, de toute façon, même pas à notre actif.
De vous à moi, plutôt de vous à la patrie, au regard de la navigation à vue dans laquelle nous sommes engloutis depuis bien de décennies, sur quel domaine pourrons-nous dire que les jalons sont clairs, le chemin balisé et des prétentions de réelle compétitivité permises ? Que chacun devant son miroir se pose la question. Les infrastructures routières ou ferroviaires ? Les hôpitaux, les écoles ou les universités ? Les infrastructures sportives ou artistiques ? Une agriculture moderne et autosuffisante ? Ai-je besoin de continuer les questions…
Quel type d’Hommes seriez-vous si, en dépit de tout, vous vous interdisez de penser notre pays, ou alors qu’on vous l’a interdit expressément ou tacitement et vous avez abdiqué, baissez vos armes ? Franchement, que ça soit l’un ou l’autre n’a aucune importance, cela conduit au même résultat. Comment qualifier cet état de fait si ce n’est du gâchis et du renoncement ?
Vous avez laissé un vide, les circonstances et les improvisations essaient tant moyen que mal de le combler. Le procès en cours sur les évènements tragiques du 28 septembre 2009 a déjà le mérite de lever un petit coin du voile sur la profondeur de cette improvisation, de cet amateurisme au sommet de l’État. Face à un tel défi de rigueur et de compétence dans la conduite de notre pays, une chose reste certaine. C’est que votre silence est autant coupable que votre inaction est décisive pour la victoire de la pochade, du hasard.
Il faut endiguer un tel spectacle. Donnons-nous la main pour penser ce pays, le modeler et le transformer si positivement qu’il y « soit interdit de mourir, tellement il fera bon d’y vivre » pour reprendre un certain Sékouba Fatako. Nous le pouvons, nous le devons et nous le devons par-dessus tout, à notre patrie, à ses enfants nés et à naître.
Retrouvons-nous et, tel un arbre, dessinons l’ancrage à la fois intelligent et profond de ses racines, la robustesse intangible de son tronc et laissons aux raisonnables divergences et dynamiques politiques et à l’imagination des enfants de notre pays l’habileté de donner de la couleur au feuillage. Pourra-t-il ainsi ombrager la terre rouge de Guinée et ses habitants face au soleil ardent de notre temps et celui de nos successeurs.
C’est possible, réaliste et nécessaire… Je vous appelle donc !
Par Galissa Hady Diallo, Docteur en droit économique, militant d’un optimisme agissant. Février-mars 2024